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Je t’écris des étoiles

mercredi 1er avril 2020, par Anne Menant

Savoir que tu souffres toi aussi de l’attente m’apporte, je l’avoue, une consolation. Combien sommes-nous, en ce moment, à chercher des expédients ? Nous ne pouvons allonger la durée de notre vie mais nous pouvons l’élargir, l’approfondir, la rendre plus dense. Tandis que tu suis le cheminement des filets d’eau de mer et d’eau de pluie mêlées sur tes 64 carreaux, mon regard se perd dans l’immensité de la Voie Lactée, je voyage dans le vide interstellaire, je fais un signe à notre boule bleue qui s’éloigne dans le noir sidéral.

Pouvoirs de l’esprit, transe, force de l’imaginaire. Cela seul nous sauvera ! Mon œil va devoir s’habituer à l’obscurité. Tandis que tu entends le bruit sourd des vagues s’entrechoquant contre les remparts, j’hallucine le murmure des constellations. La musique de l’espace m’accompagne : bruits ténus, bourdonnement, bruissements infimes que mon oreille s’exerce à capter.

Peut-être nous rejoindrons-nous quelque part aux confins des mers, à moins que ce ne soit dans l’infini du ciel ? Des millions d’âmes vont-elles se toucher, emportées par des vents déchaînés, entraînées dans la danse primitive des éléments ? S’éloigner de nos corps, ne plus sentir l’inconfort d’un fauteuil, la dureté d’un parquet, les courbatures d’un dos, mais plonger dans une quatrième dimension, dans un émerveillement renouvelable à l’infini. A côté de moi, les familles se sont rapprochées, les enfants interrogent leurs parents : que se passe-t-il ? Quand sortirons-nous d’ici ? Les parents se regardent, rassurent, disent d’attendre une prochaine annonce. Leur impuissance, leur effroi sont palpables. La nuit nous aspire.Toi au moins peux-tu voir la lumière du jour …