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La maison orange et bleue

mercredi 25 mars 2020, par Lola Sorrenti

Elle se cache derrière un virage serré et escarpé. De derrière, elle n’a pas beaucoup d’allure.
Puis, il faut longer une bordure de bambous. Hauts, sauvages, ils font office de clôture naturelle. Dedans, il y a un passage. À l’abri des regards.
Une fois de l’autre côté, on arrive dans une nature bigarrée, touffue, à la fois sauvage et apaisante.
À droite, une prairie, et au fond, un arbre. C’est peut-être un cerisier. En face, la pierre et le sous-bois et les chênes qui s’enfoncent et filtrent la lumière jusqu’à l’obscurcir.
Quand on pénètre dans la cour en pierres roses, épicentre discipliné de ce havre de paix, c’est absolu. Beau, calme, absolu. Comme une grande peinture avec des aplats de couleurs. Ça sent le thym. Ça ressemble à Cézanne.
Sous le grand sapin bleu, qui a perdu sa cime une nuit d’orage terrible, je peux installer la petite table ronde de bistrot et une chaise en bois. Le genoux remontés sous le menton, les pieds sur le rebords de l’assise. L’air est chaud. Il sèche l’encre sur la feuille. Je vois un oiseau, petit, faire les allers retours entre le dessous d’une tuile et un arbre. Je le regarde un printemps après l’autre construire son refuge depuis le mien. Il recommence. Cycle d’une vie.
Hiver. Brindilles. Bourgeons. Petits œufs blancs. Pépiements. Printemps. Quelques fleurs. Trop de plume. Un envol. Abandon du nid.