Circuit fermé

Je représente le Louvre. Je dis bonjour, je dis madame. J’indique la droite, la gauche, la Joconde au plus grand nombre, les toilettes aux femmes et aux enfants d’abord.

Peut-être pensent-ils que je vis en-deçà du mental. Pourtant mon cerveau est vivant. Malgré l’usure et le poids immobile des heures faisant leur tour.

Au sein d’un ballet continu de marches forcées derrière un guide, de déambulations romantiques de couples tout frais, incultes et heureux, de couples trop cuits, fatigués et cherchant dans les œuvres la belle émotion perdue de leur lien, d’âmes solitaires se nourrissant de sensations immatérielles mais nécessaires à leur survie, de touristes soulagés et fiers de l’aboutissement de leur voyage, ou découragés par l’ampleur de l’incontournable étape, de groupes d’amis repeignant les œuvres d’un humour potache ou caustique, au sein de ce ballet continu disais-je, vous me trouverez invariablement. Je devine la question, je lève le bras qui convient, je pointe le doigt dans la direction demandée et j’esquisse un sourire si la mécanique ne se grippe pas. En circuit fermé, cela peut arriver.