Livry-Gargan
pages ~111-120
On sait moins de choses sur l’opération de Livry-Gargan. Parce qu’elle reproduit ce qui a déjà été documenté, ou raconté, jusque dans les témoignages. Ensuite, on regrette son échec, les arrestations finales, on veut moins y penser ; sans doute était-ce mon état d’esprit. Ce n’est pas tout, cela reflète aussi ma proximité d’avec Noisy, tout simplement. Livry est plus loin, j’y suis allé moins souvent. J’ai utilisé ma situation d’écriture, pour refléter la situation des personnages-protagonistes : tout va plus vite, il fait froid, sombre, quelque chose cloche, ne va pas, qui annonce la catastrophe à venir. Il y aura finalement plus d’attente que d’action.
Que se passe-t-il entre septembre et décembre ? On sait que cette fois-ci, c’est Keller qui presse Combaux. Qu’il faut attendre le bon moment, l’opportunité. Encore une fois, comme au printemps, il s’agit d’un jeu de patience. La guerre, c’est beaucoup d’attente. On pense à ces films d’action dans lesquels chaque scène est haletante. Mais il faut penser aux préparatifs, aux vérifications, aux trajets aussi car on se voit beaucoup en personne, par sûreté. Il faut imaginer un automne qui s’installe lentement, et Jung seul dans le pavillon qui garde le matériel, simplement posé dans le garage, rue Turgot.
Quelques pages plus loin, même le pavillon n’est pas aussi bien décrit que celui de Noisy. Comme si dans ce deuxième volet, je m’étais autorisé à écrire plus de fiction, comme pour adoucir le drame [1], alors que dans le premier épisode noiséen, coller à la réalité me plongeait dans la même excitation qu’eux — et j’espère aussi lecteurs et lectrices.
Je remercie la Société Historique du Raincy et du Pays d’Aulnoye, qui m’a aidé à comprendre la ville de Livry-Gargan en 1942, m’a fournit les documents me permettant de décrire le quartier, je regrette de n’avoir pas pu en utiliser plus, montrer plus de commerces par exemple, mais refaire la vie de quartier de Noisy était impossible dans le livre. Mais il y aurait encore tant à écrire, un roman par histoire de la Résistance, chaque résistant·e pourrait avoir son livre, formant aussi un grand Réseau intemporel de mémoire.
Je partage ci-dessous un document exceptionnel qui m’a été transmis par Françoise Ibanez, le cahier technique de Serge Clauzet, chef de poste, surveillance du câble Paris Strasbourg.
[1] Aussi parce qu’ayant moins d’information, disons-le : il fallait broder !