... la vie, ça va vite ...


… C'est comme l'autre jours, j'ai vu cette femme, blonde, tailleurs, pressée, concentrée sur ses pensées et d'un coup je l'ai vu, juste avant qu'il disparaisse. Vous savez, c'est assez rare, mais je l'ai vu, ou plutôt surpris. Il était là, moi aussi, et je l'ai croisé. Une chance, vraiment, de voir ce sourire ninja discret, docile, juste avant qu'on le rappelle à l'ordre. Il était là, puis il ne l'était plus. Alors je me suis demandée, à quoi pensait-elle ? Qu'est-ce que son cerveau a produit comme image pour que ce sourire apparaisse, quel souvenir est apparu et d'où venait-il ? Et je me suis rappelée que ça m'arrivait aussi, au hasard d'une conversation, où quand j'écoute une chanson que j'aime bien, alors je me suis demandé à quoi pensais-je ? … Alors, pour cette femme, comme cette femme, en son honneur, voici une liste non exhaustive de ces choses qui me surprennent en train de sourire sans que je m'en rende compte …

… marcher dans les rues de mon patelin, écouter les canards gueuler trop tôt le matin en été, respirer et regarder les nuages passer plus ou moins vite au-dessus de ma tête, me poser avec un bon bouquin sur mon lit, porter des bonnets et des pulls (oui même en été), traîner sur internet, sentir l’intérieur de ma cage thoracique vibrer quand les basses sont trop fortes, réussir à faire une soustraction ou une division de tête sans me tromper, manger ces bonbons à la pastèques que Marie-Paule me donnait pour me calmer parce que ma mère me manquait trop la nuit, aller voir une pièce de théâtre-un film-un concert avec mes amis, écouter chacun des sons d'OrelSan, être à moitié bourrée allongée dans l'herbe à observer les étoiles, danser dans mon lit la musique à fond à chanter le plus fort possible, me rappeler de ce que j'ai sur le bout de la langue, écrire uniquement la nuit et être un loup-garou littéraire, prendre la 9518 direction Cergy-Pontoise-RoissyPole et discuter-lire-écouter de la musique/les gens qui parlent fort, lire-relire-relire encore la partie « Simone, 19 novembre 1994 » du roman d'Isabelle Monnin Les gens dans l'enveloppe juste pour la page 184 (et pleurer un peu en relisant l’entièreté de ce livre), penser un peu-souvent à la « belle époque » où on se réunissait tous chez la grand-mère à quatre sur le canapé et deux sur les chauffeuses bleues au sol chacun une tasse de lait chaud sucré en main (même si on aime pas tous ça) et regarder la télé, allumer une bougie juste pour voir la flamme danser et se refléter au plafond, regarder Jetix tous les midi de la semaine avant de repartir à l'école (principalement pour Pokémon), m'écrouler dans mon fauteuil chez ma grand-mère qui laisse pile assez de place pour mon dos (ma tête dépassant d'un côté, l'entièreté de mes jambes de l'autre) et donc me rendre compte que j'ai grandi depuis l'époque où je rentrais toute entière sur le coussin roulée en boule comme un chat, relire mes vieux textes pour trouver de l'inspiration (mais ça marche mal), écouter les gens parler une langue que je comprend pas, comprendre les références que font les gens et réciproquement, manger de la ratatouille-des sushis-des compotes et boire des soupes déshydratées-du thé-du rosé, croiser des gens qui ont l'air heureux (et réfléchir à ces choses qui pourraient les faire sourires), voir des personnes âgées de mon patelin assises sur un banc à côté du lac, prendre un bain après une longue journée, écouter les versions live de mes chansons préférées, manger des restes de pizza froide pour le petit dej, ouvrir mes volets le matin et observer mon patelin encore endormis-des gens qui promènent leurs chiens-des canards nageant dans le lac, jouer à Super Mario Sunshine sur ma bonne vieille GameCube grise, me sentir la plus respectable du monde quand je range ma chambre, mettre cette petite robe bordeaux au printemps, regarder-regarder-regarder encore Archer-Full Metal Alchemist(pour la voix d'Arthur Pestel(SiTuPassesParLàÉpouseMoiStp)), allumer mes lampions et me poser dans mon fauteuil violet pour écrire, ressortir ma flûte traversière pour jouer trois notes la nettoyer et la ranger après, dire bonjour au chauffeur de bus, faire une blague et voir que les gens rigolent, regarder des patounes de chat, voir quelqu'un tomber-les lives twitch de mes streamers préférés, regarder ce gif d'une poule noire qui ''glop'' en continu, prendre du recul pendant une conversation du groupe et me dire que les gens parfois sont cools, mettre des cornichons dans mes sandwichs …

… J'en oublis plein, mais pour ce que je veux dire, ça ira n'est-ce pas ? Toutes ces choses me rendent heureuse, tous à un même niveau de joie, parce que la joie, comme toute émotion, est inquantifiable, comme le nombre de choses qui peuvent me rendre heureuse, ou du moins me faire sourire. La vie est peuplée de moments idiots qui rendent heureux, je veux me dire que c'est ce que je représente, un moment idiot qui rend heureux. Je suis un moment idiot qui rend heureux, puisque je ne peux pas être une tempête de neige silencieuse, alors je serais un moment idiot qui rend heureux. Voilà. Appelez moi l'idiote qui pendant un moment rend heureux. Oui. Appelez moi comme ça …




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