Abîme & Temps

Atelier code & écriture

D'après Mahigan Lepage et Philippe de Jonckheere.
Mahigan Lepage, le 2.1.2018, dans son blogue.

Projet, abîme & temps

Longtemps que j'ai ce désir d'un texte ouvert qui rassemblerait des fragments de monde, des passées de territoires. Non pas un livre, pas du tout, mais un chantier. Ce n'est même pas l'écriture que je désire, tant que m'installer dans l'écriture, habiter cette fatigue sur un temps long, peut-être même infini. Un work in progress qui ne serait jamais résolu, jamais conclu, mais qui tenterait toujours de trouver son organicité propre, malgré tout, non pas dans le recommencement ou le carpe diem du journal, mais dans le jointoiement ouvert et multiple des parties. Autrement dit, non pas une suite de textes, mais plutôt une sorte de récit obstinément inachevé, qui se chercherait de fois en fois. Un texte sans bords, vraiment : un chantier continuellement in progress, sans aucun horizon de publication livresque, sans fin mot de l'histoire. Chaque fois que j'ai voulu lancer un tel chantier, j'ai bloqué. En fait, je dis chantier, mais ç'a été mille projets, chaque fois différents, chaque fois échoués, réunis seulement par une certaine idée du monde, de ce qui traverse, par une certain idée d'ampleur aussi, toujours échappée. Parce qu'on ne sait pas : voilà le problème. Je peux me saisir d'un bout de réel, d'une image, d'un visage qui passe, d'une fulgurance. Je peux l'écrire, mais je n'en ferai pas 200 pages, comme le ferait peut-être un romancier qui imaginerait un personnage derrière ce visage, un vécu, etc. C'est donc très bref, très parcellaire, dans le monde du récit, et même si on fait le pari de la multiplicité, je ne crois pas qu'on aura un ensemble infini : viendra un moment où on sera en panne de matière, où on aura épuisé nos images, ou sinon on se lassera de répéter la même approche sur une multitude d'images. Ces derniers jours, j'ai peut-être trouvé la clé, en remontant d'un niveau. Tous ces projets échoués que j'ai fomenté depuis des années, voilà ce qu'il faut écrire. Ces échouements. Les écrire, et en inventer d'autres. Toujours, sans fin. Inventer des projets. Écrire ces projets. Pas vraiment des projets d'écriture, mais des façons d'aborder le réel, des idées d'abords du réel. Et ça, oui, oui, ça me semble infini. On peut imaginer mille projets, mille approches du réel, pourquoi pas? Ce faisant, on ne triche pas avec l'inconnaissance : on ne prétend pas connaitre ce visage qui passe, ou ces Birmans cheap labor qui vivent dans des cases de tôle près de chez moi à Chiang Mai (par exemple). On ne leur invente pas des vies qu'en réalité on ignore complètement, quoi qu'on en pense. Ce qu'on invente, ce sont les abords, les angles, les façons de les approcher, de les raconter, en dépit de notre ignorance. Faudra le tenter, pour voir si ça tient. Je voudrais lancer ça en 2018, possiblement, et l'habiter pendant très, très longtemps – peut-être.
L'atelier se déroulera en plusieurs ateliers, chacun concentré sur une contrainte d'écriture. Le code HTML et CSS développé sera réalisé dans l'esprit du Désordre de Philippe de Jonckheere, photographe et écrivain, et plus particulièrement de la page Ursula, en mode défilement horizontal, prenant à revers nos habitudes verticales.
Ursula février 2015
Dans le déroulé des ateliers, on pensera aussi au site d'Isabelle Pariente-Butterlin, professeure de philosophie à l'université d'Aix-Marseille, et à son site Aux bords des mondes, qui est un work in progress de pensée et d'analyse, un atelier ouvert (cependant actuellement fermé, mais pourtant en cours), sous la forme d'un site Spip standard à charte stricte, dont les rubriques sont des séries chapitrées de réflexion sur la philosophie.
Voir aussi Tentatives, le site de Christine Jeanney, en particulier la rubrique Textes, constituée de séries longtemps "en cours", toujours arrêtées, mais finalement toujours ouvertes virtuellement.

Les ateliers

Les sites

Les sites créés par les étudiant.e.s. Du Désordre et de l'abîme arrêtés nets par la fin de l'année scolaire :
à découvrir